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L'état végétatif exclut-il l'indemnisation des souffrances endurées ?

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Une victime dans le coma ou en état végétatif chronique peut elle être indemnisée de sa douleur ?

Des assureurs ont prétendu que l'état végétatif chronique de la victime d'un accident impliquait nécessairement l'absence de toute douleur physique et par conséquent. l'exclusion du droit à indemnisation du poste de préjudice des "souffrances endurées".

Toutefois, récemment saisie de cet argument dans le cadre de la responsabilité médicale d'un médecin Anesthésiste,  la Cour de cassation réaffirme que l’état végétatif chronique de la victime d’un accident n’exclut aucun chef d’indemnisation.

Son préjudice doit être réparé dans tous ses éléments.

L'indemnisation des souffrances endurées par une victime en état végétatif chronique

Une victime dans le coma ou en état végétatif chronique peut-elle être indemnisée de sa douleur ?

S’il est difficile d’apprécier le degré de souffrance pour ces victimes, peut-on pour autant nier son existence au motif que l'indemnisation de la douleur suppose la conscience de la victime ?

Une approche subjective, parfois évoquée par les assureurs consiste à soutenir que le préjudice des "souffrances endurées" suppose que la victime ait la capacité à se représenter la douleur.

Toutefois, la jurisprudence (Cour de cassation et Conseil d'Etat) retient une approche objective de la douleur en lien avec le dommage corporel subi.

  • « l’état végétatif d’une personne humaine n’excluant aucun chef d’indemnisation son préjudice doit être réparé dans tous ses éléments » (Cour de cassation 2e civ., 22 févr. 1995, n° 92-18.731)
  • «la circonstance qu’un patient se trouve placé dans un état végétatif chronique, ne conduit, par elle-même, à exclure aucun chef d’indemnisation ni ne fait obstacle à ce que le préjudice subi par la victime soit réparé en tous ses éléments » (CE, 24 nov. 2004, n° 247080).

La Cour de cassation, dans un arrêt du 15 janvier 2019 a été à nouveau saisie de cette question dans une affaire de responsabilité médicale pour faute d'un médecin Anesthésiste.

 

Responsabilité médicale : faute du médecin anesthésiste

Le 12 décembre 2007, une jeune femme de 23 ans, est hospitalisée en clinique pour y subir deux opérations courantes : une biopsie utérine par curetage et une coelioscopie.

L’anesthésiste laisse sa patiente sans surveillance alors qu'elle se trouve sous anesthésie générale et la sonde endotrachéale se déconnecte. La jeune femme est alors victime d'anoxie cérébrale prolongée.

Les séquelles sont dramatiques, la victime est en état végétatif chronique.

L'expertise médicale de la victime conclut à une incapacité permanente partielle de 99 %.

Par un arrêt du 15 janvier 2019, la Cour de cassation (chambre criminelle n° 17-86461) retient la responsabilité de l'anesthésiste pour faute caractérisée.

Le médecin anesthésiste qui laisse la patiente toujours placée sous anesthésie générale, sans surveillance par un personnel habilité commet une faute caractérisée et expose la victime à un risque d’une particulière gravité…

« qu’en laissant sa patiente, toujours placée sous anesthésie générale, sans surveillance par un personnel habilité au moment critique qu’est par nature le changement d’intervention, avec des mouvements de personnel, un changement de matériel induisant une baisse de vigilance, et une éventuelle mobilisation, Mme Y… (anesthésiste) a commis une faute caractérisée qui a exposé Mme B… à un risque d’une particulière gravité, inhérent à toute anesthésie générale, que tout médecin anesthésiste ne peut ignorer de par sa formation ;

"Attendu qu’en l’état de ces énonciations, d’où il résulte que les fautes caractérisées commises par Mme Y… ont contribué de façon certaine à créer la situation ayant permis la réalisation du dommage, nonobstant l‘imparfaite organisation des services qui ne peut être considérée comme la cause exclusive du dommage, les juges ne pouvant par ailleurs se prononcer sur les responsabilités éventuelles d’autres intervenants des agissements desquels ils n’étaient pas saisis, la cour d’appel a justifié sa décision ».

 

L'indemnisation des souffrances endurées contestée

Outre sa responsabilité médicale pour faute, la médecin anesthésiste contestait également l'indemnisation de 50.000 € allouée à la victime au titre du préjudice des 'souffrances endurées".

Elle prétendait que la Cour d’appel ne pouvait se contredire « en ayant expressément constaté que la victime était placée sous anesthésie générale puis sous coma artificiel, ce qui impliquait nécessairement l’absence de toute douleur physique”.

L'indemnisation des souffrances endurées devaient ainsi être exclue.

La Cour de cassation rejette ce moyen du pourvoi :

"Attendu que l'état végétatif chronique de la victime d’un accident n’excluant aucun chef d’indemnisation, son préjudice doit être réparé dans tous ses éléments ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ».

La Haute juridiction confirme ainsi la jurisprudence en vigueur et préserve l'intégralité des droits des victimes en état végétatif.